INRA : retour sur le conseil d’administration de l’INRA convoqué le 13 décembre ... avec à l’ODJ le premier budget de l’INRAE
Les organisations syndicales CGT et SUD participant à un mouvement reconductible pour la défense des régimes de retraite solidaires, les élu-es n’ont pas siégé vendredi dernier 13 décembre 2019 au Conseil d’Administration de l’INRA.
Ci-dessous, vous trouverez notre analyse du premier budget de l’INRAE, nos positions sur la création d’une association entre INRAE, Terrena et Triskalia et sur le risque d’abandon des activités pédagogiques et patrimoniales de la Villa Thuret. ...
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Analyse de nos 2 syndicats CGT et SUD sur le premier budget 2020 de l’INRAE
Nos organisations syndicales participant à un mouvement reconductible pour la défense des régimes de retraite solidaires, les élu-es CGT et SUD n’ont pas siégé vendredi dernier 13 décembre 2019 au Conseil d’Administration de l’INRA, maintenu pour tenir le rythme infernal imposé pour faire passer la fusion au 1er Janvier 2020.
Ci-dessous, vous trouverez notre analyse du premier budget connu de l’INRAE, nos positions sur la création d’une association entre INRAE, Terrena et Triskalia et sur le risque d’abandon des activités pédagogiques et patrimoniales de la Villa Thuret ; positions que nous avons fait connaître par écrit le 13 décembre aux autres membres du conseil d’administration de l’INRA.
Malgré les efforts dérisoires consentis par les tutelles, le premier budget INRAE expose au grand jour toutes les faiblesses structurelles de cette fusion INRA-IRSTEA, déjà dénoncées par les organisations syndicales dès la publication des rapports des comités de pilotage en 2018 :
- Un budget « au plus serré », à peine mieux que la somme des deux EPST précédents : l’IRSTEA en difficulté financière chronique et l’INRA à peine mieux loti, ce qui ramène les déclarations de nos ministères de tutelles au sujet de ce nouvel Institut « taillé pour répondre aux défis de demain » à leur statut de fausses promesses. Le budget initial 2020 de l’INRAE est donc conforme au budget prévisionnel qui a été décrit dans le rapport COMOP Appui au printemps 2018. Nous y retrouvons les mêmes chiffrages. Mais le compte n’y est pas, et les demandes des représentant-es du personnel répétées depuis 2018 n’ont pas été entendues
Les subventions pour charges de service public sont en hausse de 10,1M€ alors que le simple suivi du taux d’inflation aurait nécessité 12,56M€. A cela s’ajoutent les augmentations dues à la mise en place de la PPCR de 4,1M€, de la convergence indemnitaire pour 2,5M€, du passage en dessous de 85% du taux SCSP/masse salariale pour l’IRSTEA pour 6,09M€ et de 3,9M€ pour terminer la reconstruction du bâtiment détruit par les intempéries à Montpellier. C’est donc une augmentation de 29,15M€ et non pas de 10,1M€ que nous espérions. Pour s’en sortir, la création du nouvel institut s’accompagnera du maintien du blocage du point d’indice des salaires et d’une baisse de 4% des dotations faites aux services d’appui à la recherche.
Et cela veut bien dire que le financement de la fusion sera à trouver en faisant des économies en interne, forcément au détriment de l’emploi et des conditions de travail des agents et en sabrant dans certaines activités scientifiques.
- La magnifique ambition de devenir un leader international en matière de recherches sur l’environnement… mais un seul petit million d’euros supplémentaire pour initier des projets conjoints entre équipes des deux ex-établissements (sur environ 300 millions d’euros de dotations globales aux unités) et aucun effet de levier budgétaire en matière de recherches dédiées. La volonté de se séparer d’une partie de la Villa Thuret, joyau reconnu mondialement pour ses collections de plantes exotiques n’envoie pas non plus un bon signal. D’ailleurs, sur la partie dite "OUEST", là où se situe proprement dit la Villa Thuret et le jardin botanique classé remarquable se trouve l’UEVT (Unité Expérimentale Villa Thuret) qui dépend du département EFPA et dont l’avenir s’avère incertain. L’absence du Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire à toutes les étapes de préparation de la fusion, et qui ne sera pas tutelle de l’INRAE alors que nous en faisions explicitement la demande, marque aussi ce budget initial. Heureusement, l’INRAE se dépêche de fonder une association avec Terrena et Triskalia (*) pour faire évoluer l’élevage intensif du grand ouest : voilà qui nous rassure sur l’ambition écologique du nouvel Institut !
-Une convergence a minima des carrières des agents des deux ex-EPST, qui garantit seulement aux ex-IRSTEA de conserver un accès à un quota de promotions qui leur évitera le choc de la dilution dans INRAE… mais au mépris du mieux-disant social que les directions s’étaient engagées à respecter. Aucun rattrapage des carrières INRA, notoirement mauvaises, ni aucune augmentation des taux de promotion ne sont envisagées. Ce problème doit être pris au sérieux et des réponses doivent y être apportées - sous forme de campagnes exceptionnelles de promotions - avant l’unification totale de la gestion des corps de titulaires Recherche prévue à partir de 2023 ; sinon, cela causera de vives tensions entre les agents ex-INRA et ex-IRSTEA et donc un gros obstacle à la création d’une communauté de travail unique et solidaire ;
- Au contraire, il n’y aura aucun effort non plus sur le nombre de postes ouverts aux concours en 2020, laissé à son niveau consolidé de 2019 ce qui retentira directement sur les taux de promotion, toujours au plancher. Ce budget 2020 prévoit ainsi un maintien du nombre de recrutements au niveau consolidé des budgets initiaux 2019 des deux établissements (178 postes pour l’INRA et 29 postes pour IRSTEA). Le nombre de poste ouverts aux concours externes s’élève ainsi à 207 dont 56 postes de chercheurs (contre 57 en 2019) et 151 postes d’ITA (contre 150 en 2019) sur une communauté de l’ordre de 8800 personnes titulaires ; dont on ne sait pas combien partiront à la retraite en 2020 et seront ou pas remplacés…
- L’abondement de budgets dédiés à la recherche sera explicitement financé par des coupes budgétaires significatives sur les fonctions d’appui, permises (selon les directions) par des économies d’échelle ou de réorganisation, réalisées grâce à la fusion. Or les services d’appui sont clairement ceux où agents et agentes sont le plus impacté-es par la fusion, comme l’ont bien montré les experts mandatés pour « accompagner le changement » aux sièges et dans les SDAR. Assoir la viabilité budgétaire du nouvel Institut en demandant encore plus d’efforts aux métiers d’appui, c’est prendre le risque d’un burn-out généralisé dans ces métiers et d’une qualité dégradée des services rendus aux unités ;
- Concernant la rémunération des CDD et doctorant-es, variable d’ajustement habituelle des derniers budgets contraints de l’INRA, nous demandons que le premier budget 2020 de l’INRAE commence à rattraper le retard pris dans l’amélioration des rémunérations de ces populations, avec l’élargissement à tous les contractuel/les de l’augmentation attribuée uniquement aux nouveaux contrats signés depuis l’été 2019, le relèvement immédiat de la rémunération de tous-tes les doctorant-es de 20 %, mesure partiellement mise en oeuvre au CNRS depuis octobre dernier ainsi que leur accès au supplément familial de traitement (SFT) conformément à la circulaire de novembre 2016 du ministère.
Les équipes des deux établissements auront à cœur de réussir la fusion et de lancer leur nouvelle communauté de travail dans une nouvelle dynamique. Pour beaucoup, cette fusion représente une opportunité pour infléchir significativement la recherche publique agronomique vers une meilleure prise en compte des questions environnementales et sociétales de plus en plus urgentes. Ce budget n’apporte hélas aucun souffle nouveau. Il compte, une fois de plus, sur la bonne volonté des équipes pour accepter des conditions de travail toujours moins confortables, et les laisse les unités abonder leur trésorerie avec des contrats, prestations, expertises et autres productions toujours plus chronophages, dont dépendront désormais la soutenabilité économique de l’INRAE.
(*) Le CA du 13 décembre 2019 était également appelé à délibérer sur la création de l’Association Ouesterel, avec pour membres fondateurs l’INRAE, Triskalia et Terrena. Cette association aurait les mêmes objectifs et ambitions que le projet Laboratoire d’Innovation Territoriale Ouest Terre d’Elevage (LIT Ouesterel) financé par la Banque des Territoires à hauteur de plus de 30M€ dont 4.5M€ de subventions directes aux établissements publics et associations, et le reste en prises de participation de la Banque des Territoires au capital des entreprises partenaires en contrepartie d’investissements programmés par le projet. A quoi servirait donc cette association ?
Le but affiché est de pouvoir associer de nouveaux partenaires au cours de l’exécution du projet. Mais le montage permet aussi aux entreprises de bénéficier des liquidités permises par les subventions de la Banque des Territoires… Surtout, nous dénonçons, une fois de plus, le lobbying et l’accaparement exercé par Triskalia et Terrana à l’égard de la recherche publique agronomique. Ces coopératives sont-elles si vertueuses qu’il faille leur accorder notre confiance pour assurer la profonde transition agricole dont le Grand Ouest a besoin ?
Elles sont pourtant en grande partie responsables du désastre écologique et humain qui se joue dans les filières de productions animales dites « conventionnelles ». Le temps et les moyens que nous investissons « pour accompagner » ces entreprises n’est pour elles que du temps et des moyens gagnés à s’assurer que rien ne change, en nous mobilisant loin des véritables fronts de recherche ! Nous opposons avec force, comme nous l’avons déjà fait sur le Centre Bretagne-Normandie ou dans cette instance, à l’association de notre établissement public avec des entreprises dont le seul but est de conserver leur position dominante, et dont au moins l’une d’entre elle a déjà été condamnée à de multiples reprises pour faute à l’égard de ses salariés empoisonnés aux pesticides !