CNRS : Intervention Sud Recherche EPST - Comité Technique du 10 Mars 2015 A propos du Contrat d’Objectifs

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Lors du dernier CT le contrat d’objectif entre le CNRS et l’Etat était en débat.
Voici l’intervention de notre syndicat juste avant de voter contre.

Intervention Sud Recherche EPST au CT du 10 mars 2015 au sujet du contrat d’objectif CNRS/État

Il nous a souvent été rétorqué dans cette instance que la direction du CNRS ne faisait que suivre la Loi, rien que la Loi… Nous commencerons donc cette intervention en citant la Loi, et pas n’importe quelle Loi, le Code de la Recherche dont l’article L311-2 (modifié par LOI n°2013-660 du 22 juillet 2013 - art. 93) dit : « Tout établissement public de recherche conclut avec l’État des contrats pluriannuels qui définissent, pour l’ensemble de ses activités, les objectifs de l’établissement ainsi que les engagements réciproques des parties. L’exécution de ces contrats fait l’objet d’une évaluation. L’État tient compte des résultats de l’évaluation réalisée par le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, en particulier des résultats obtenus en application des dispositions de l’article L. 114-3-2 du code de la recherche, pour déterminer les engagements financiers qu’il prend envers les établissements dans le cadre des contrats pluriannuels susmentionnés. »
Il est donc clairement fait état dans la Loi d’engagement réciproque des deux parties, or dans le document qui nous est soumis il n’y a aucun engagement de l’État. Il s’agit de fait une fois de plus d’un contrat d’objectif sans moyens. Ainsi, « le principe de pertinence » que le DGDR, lors du CT du 8 janvier, s’est targué d’avoir arraché au Ministère et qui est présenté dans le document comme un engagement réciproque impliquant un engagement de l’État en terme de moyens ne constitue rien de tel. Il pourrait même s’avérer dangereux. Dangereux pour les équipes et les chercheurs qui n’auront pas atteint les fameux objectifs, mais aussi pour le CNRS, la recherche, et les statuts de manière plus générale. En effet, en écrivant : « L’État s’engage à favoriser toute mesure d’ordre organisationnel et/ou juridique facilitant l’accomplissement des missions confiées au CNRS », le risque est grand de voir un jour de prétendus conseillers bien intentionnés expliquer par exemple que le statut des personnels est un frein à l’innovation et au transfert, ou autres balivernes, et réclamer le contrat de projet. Étant donné que dans le document rien ne rappelle un quelconque attachement aux statuts des personnels et leur importance pour la réalisation des missions du CNRS la porte est donc ouverte à toutes les dérives. De même lorsqu’il est écrit « L’État s’engage à identifier les mobilisations de ressources nécessaires à la mise en œuvre de missions nouvelles qui pourraient être confiées au CNRS », il n’est pas écrit que l’État s’engage à mobiliser ces ressources mais seulement à identifier les ressources qui peuvent être mobilisées… On pourrait donc se retrouver avec des injonctions telles que « fermer telle ou telle structure, abandonner telle ou telle thématique » afin de dégager les ressources à mobiliser ! Une fois de plus c’est la porte ouverte à toutes les dérives. Pour Sud Recherche EPST, ces prétendus engagements de l’État sont donc très loin de faire de ce document un Contrat d’Objectifs et de Moyens tel que prévu par le Code de la Recherche.

Venons-en maintenant un peu plus en détail au contenu du document. On y trouve-là une application zélée des lois qui ont profondément modifié l’enseignement supérieur et la recherche ces dernières années, avec toutes les dérives que nous avons régulièrement dénoncées : Marchandisation et régionalisation de la recherche, perte des capacités des organismes à piloter et mettre en œuvre leur propre politique scientifique, compétition à outrance, individualisation. Le document prend acte du choix du gouvernement de ne pas donner les moyens d’une recherche publique forte ouverte et au bénéfice de tous. Par contre, dans ce contrat d’objectif on ne trouvera :
 RIEN sur la nécessité d’un véritable plan de résorption de la précarité, alors que les besoins sont pressants et que les moyens existent ;
 RIEN sur la nécessité du maintien du statut de titulaire, pourtant indispensable à l’accomplissement de la mission de service publique de recherche ;
 RIEN sur la carrière des agents ;
 RIEN sur la nécessité de financement récurrent des laboratoires et des services.
Au contraire, ce contrat d’objectif insiste lourdement sur le renforcement des ressources propres et le développement du financement sur projet, malgré tout ce que cela comporte en termes d’accroissement de la précarité et de perte de la capacité de pilotage des organismes. Au final, on confine bien ici l’organisme à un rôle d’agence de moyen, qui met à disposition ses moyens humains, ses outils, ses infrastructures au profit de projets scientifiques qui sont décidés ailleurs et même évalués ailleurs. La demande de l’introduction d’une mission de centrale d’achat pour le CNRS en est une des illustrations presque caricaturale. D’autre part, au travers d’une petite phrase - qui pourrait sembler anodine - au sujet de l’application CAPLAB, « Elle devrait permettre notamment de faciliter l’élaboration des dossiers HCERES, mais aussi à terme d’autres dossiers nécessitant une présentation du laboratoire. », la direction semble écarter toute possibilité de retour de l’évaluation des unités au sein du Comité National, possibilité qui reste pourtant ouverte par la Loi (Article L114-3-1 du Code de la Recherche et Décret n°2014-1365 du 14 novembre 2014 relatif à l’organisation et au fonctionnement du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur).
Enfin, en réservant 6 pages à la valorisation des résultats de la recherche au bénéfice du privé, et moins d’une page aux relations entre science et citoyens, la direction du CNRS affiche clairement quelles sont ses priorités pour l’organisme : Se mettre au service des entreprises, « assurer leur compétitivité » ; pour utiliser les mots mêmes du document, sans jamais se soucier de savoir si cette « compétitivité » ne sert pas qu’à assurer des dividendes aux actionnaires, au détriment de l’emploi et de l’investissement ; sans jamais s’inquiéter du fait que nombre de ces entreprises détournent l’argent public au travers d’une prétendue « optimisation fiscale ». Notre leitmotiv à nous, Sud Recherche EPST, c’est au contraire des moyens publics pour une recherche publique au service de toutes et tous !

Sans surprise, ce contrat d’objectif ne répond en rien aux attentes qui se sont exprimées et continuent de s’exprimer dans notre milieu, que ce soit lors du mouvement de cette fin d’année 2014 ou encore plus récemment dans les universités en lutte. Au contraire, ce contrat d’objectif entérine et prolonge des évolutions que Sud Recherche EPST a toujours considérées comme dangereuses pour l’avenir du service public de recherche et d’enseignement supérieur, et ce ne sont pas quelques aménagements de formes à la marge qui pouvaient le rendre acceptable à nos yeux. Sud Recherche EPST votera donc CONTRE ce contrat d’objectif.

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